Deutsch English Français Italiano |
<u75tpn$1b9f$1@dont-email.me> View for Bookmarking (what is this?) Look up another Usenet article |
Path: ...!eternal-september.org!news.eternal-september.org!.POSTED!not-for-mail From: Marcel grouillard <marcel.grouillard@worl.com> Newsgroups: fr.rec.arts.musique.classique Subject: Re: SENTIERS... Date: Sat, 24 Jun 2023 07:09:11 +0200 Organization: A noiseless patient Spider Lines: 105 Message-ID: <u75tpn$1b9f$1@dont-email.me> References: <648b1ace$0$7632$426a74cc@news.free.fr> <u75jup$qo0$1@rasp.pasdenom.info> MIME-Version: 1.0 Content-Type: text/plain; charset="iso-8859-15"; format=flowed Content-Transfer-Encoding: 8bit Injection-Date: Sat, 24 Jun 2023 05:09:11 -0000 (UTC) Injection-Info: dont-email.me; posting-host="0c5b05d24b41c3348a072d5fcb9fe932"; logging-data="44335"; mail-complaints-to="abuse@eternal-september.org"; posting-account="U2FsdGVkX18Wp25koWSSpkZJ52zUwn3g" Cancel-Lock: sha1:R5JwCa3xySWiEtDSinyEetBp7KM= X-Antivirus-Status: Clean X-Newsreader: MesNews/1.08.06.00 X-Antivirus: Avast (VPS 230623-6, 23/6/2023), Outbound message Bytes: 8160 Paul & Mick Victor a formulé la demande : > Le 15/06/2023, MELMOTH a supposé : >> https://www.youtube.com/results?search_query=PianistsandMore >> >> Pour sortir des Sentiers battus... >> D'immenses artistes jamais ou si rarement enregistrés, ou complètement >> oubliés... > > J'ai jeté un coup d'½il sur ce florilège. Pour l'essentiel, des pianistes > américains. Je n'ai rien contre les pianistes américains, tout le monde a le > droit de pianiser et de musiquer, m'enfin, pourquoi pas un seul pianiste > français dans cette liste, ou à défaut, nul n'est parfait, pourquoi pas un > pianiste formé en France par le Conservatoire national de Paris ? Car, n'en > déplaise à certains, il y a une tradition pianistique française, mes gueux, > une belle et grande tradition, tout en élégance et en raffinement. On pense > bien sûr à quelques noms emblématique : Cortot, Marguerite Long, Yves Nat, > Samson François, et les musilomanes avertis en évoqueront bien d'autres, > moins médiatiques. Des noms ? Pourquoi pas Jean Hubeau, qui nous légua une > très belle intégrale des pièces pour piano de Fauré ? Pourquoi pas Michel > Béroff, grand interprète de Messiaen (et de Debussy) ? Pourquoi pas Éric > Heidsieck, Jean-Bernard Pommier, Bruno Rigutto, Philippe Entremont, Jacques > Février ? Et, chez les dames, Monique de la Bruchollerie, de qui j'eus > quelquefois l'honneur, dans ma jeunesse, de recevoir les critiques et les > encouragements, Annie d'Arco, dont je garde le doux souvenir des Romances > sans paroles de Mendelssohn, Yvonne Lefébure, qui, sortant de scène après un > époustouflant concerto l'Empereur, disait : "J'ai encore raté mon mi bémol", > etc. Ils sentent le pâté, ceux-là ? Et pourquoi pas celui qui nous a quittés > le 29 janvier dernier, il y a moins de cinq mois, dans une indifférence quasi > générale. J'ai fouillé les archives de framc sur Google groups : constat > affligeant ! Pas un seul message, pas le moindre hommage, pas la plus infime > larmichette pour ce grand pianiste qui fut le dernier - et sans doute le seul > - disciple de Francis Poulenc. Je ne vous dirai même pas son nom, vous ne le > méritez pas, gens du forum. Cherchez si vous voulez, ou faites comme s'il > n'avait jamais existé, puisque sa disparition n'a, semble-t-il, pas troublé > le moins du monde vos mornes existences. > > Il y a des pianistes français, certes, mais également des pianos français. > Aujourd'hui, la quasi totalité des concerts et des enregistrements sont > réalisés sur des pianos Steinway ; quelques-uns, beaucoup plus rares, sur des > Bösendorfer ou des Yamaha (rappelons que Bösendorfer est désormais propriété > du groupe Yamaha). Quant à la facture française, qui avait une réputation > mondiale au XIXe siècle et dans la première partie du XXe siècle, elle a > quasiment disparu des scènes et des studios. Trois grands noms assuraient ce > rayonnement : Pleyel, Gaveau et Erard. Les deux derniers ont été rachetés par > le premier, leurs noms, tout au moins, car Gaveau et Erard ne produisent plus > d'instruments. Quant à Pleyel, il appartient aujourd'hui au groupe Algam, et > continue de fabriquer des pianos haut de gamme, dotés de cette sonorité à la > fois chaude et cristalline qui faisait le bonheur de Chopin. > > J'entends vos arguments, gens du faux rhum. L'orchestre de Haydn ou de Mozart > était composé d'une trentaine ou d'une quarantaine d'instrumentistes. À > partir de l'époque romantique, les effectifs ont doublé, voire triplé. Là où > les cordes, tous pupitres confondus, tournaient autour de 24 musiciens à la > fin du XVIIIe siècles, elles sont passées à 48, parfois à 60, et même à 72 > chez Mahler. On comprend bien que pour faire face à cette inflation, il faut > des pianos au timbre sonore, clair et puissant, capables de se détacher et > de s'imposer au milieu d'un orchestre pléthorique et dans une salle > surdimensionnée, et Steinway remplit admirablement ce cahier des charges. Ne > faisons pas la fine bouche : les pianos Steinway sont de véritables bijoux, > les Formule 1 des bouzins à marteaux, à la hauteur de leur prix (plus de > 200.000 euros, tout de même, pour le D274). J'en ai fait quelquefois > l'expérience : pour un pianiste, jouer sur un Steinway ou sur un Bösendorfer > de concert est une expérience jouissive, de l'ordre de celle du passionné de > bagnoles qui se trouve un jour au volant d'une Ferrari. Mais le résultat de > ce quasi monopole est l'uniformisation des interprétations. Parce qu'ils > jouent tous sur des Steinway, tous les pianistes ont, peu ou prou, la même > sonorité. Si Steinway est imbattable dans un concerto de Rachmaninov ou de > Ravel, on peut s'interroger sur sa pertinence dans des ½uvres plus intimes, > des sonates, des trios, des quatuors, des mélodies. Sans forcément fouiller > dans les caves des musées pour exhumer de vénérables pianoforte bouffés aux > charençons dont la sonorité aigrelette émaillée de cliquetis et de > grincements évoque souvent davantage le bastringue de bordel que le piano de > concert, pourquoi, dès lors que la puissance n'est plus en enjeu, ne pas > choisir un bon Pleyel, un grand Gaveau bien restauré, un piano moins > "écoutez-comme-je-sonne" et plus "écoutez-comme-je-chante" ? (avez-vous noté, > au passage, le caractère quasi proustien de cette phrase à tiroirs ?) Ce qui > ne veut pas dire qu'on ne peut pas faire gémir et se pâmer un Steinway, comme > une innocente (mais un peu salope) Cécile Volanges sous les doigts pervers > d'un Valmont. Qu'on écoute et médite cette magnifique leçon de piano : > https://www.youtube.com/watch?v=FxhbAGwEYGQ > > Comment qu'il fait chanter sa mélodie, l'animal ! Comme il sait faire > ressortir les trois plans, le chant dans les aigus, le petit friselis médian, > comme une impalpable dentelle, et le glas des basses. Je te le dis, mon gars : > avant que le petit doigt de ta main droite arrive à faire sonner comme ça > rien que les quatre premiers si bémol, il te faudra pas mal d'années de > travail. Malgré cela, je persiste à penser que le résultat de cette > magistrale interprétation serait meilleur sur un piano moins brillant, moins > fanfaron, aux basses moins sonores et moins envahissantes, un instrument plus > modeste, plus introverti. C'est la personnalité de l'interprète qui doit > s'imposer, pas celle de l'instrument. > > Pour conclure, un regret : que les pochettes de disques n'indiquent pas > systématiquement la marque de l'instrument utilisé pour l'enregistrement. On > le fait souvent pour le clavecin ou pour l'orgue, beaucoup plus rarement pour > le piano. Je vais déposer en ce sens une pétition auprès du ministère de la > Culture. N'hésitez pas à soutenir mon action par vos dons. Virements > bancaires et travellers chèques acceptés. Texte fort bien écrit (et musicalement intéressant) : félicitations à Paul, à Mick, à Victor et au quatrième surtout. -- Cet e-mail a été vérifié par le logiciel antivirus d'Avast. www.avast.com