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From: Paul & Mick Victor <b.suisseVotreculotte@gmail.com>
Newsgroups: fr.rec.arts.musique.classique
Subject: Re: Des mots, des notes. H. comme Harmonica (2)
Date: Thu, 28 Sep 2023 04:51:14 +0700
Organization: <https://pasdenom.info/news.html>
Message-ID: <uf284k$s0u$1@rasp.pasdenom.info>
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Injection-Date: Wed, 27 Sep 2023 21:51:16 -0000 (UTC)
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X-Newsreader: MesNews/1.08.06.00
Bytes: 3550
Lines: 38

MELMOTH a couché sur son écran :
> Après mûre réflexion, Paul-Olivier Margail a écrit :
>> Giono et Pagnol figurent dans mon Patrimoine perso de l'humanité
>
> Normalement, Victor devrait te rétorquer qu'il n'en a rien à battre...

Mais rien n'est normal aujourd'hui, Melmoth. Pour ma part, me vautrant 
sans vergogne dans le hors-sujet, j'apprécie également Pagnol et Giono, 
mais pas dans la même catégorie. Je ne les mets pas sur le même plan. 
Si la postérité juge honnêtement, elle conservera Giono et oubliera 
Pagnol, elle admettra que la Provence de Colline ou de Regain n'a pas 
grand-chose – strictement rien – à voir avec celle de Manon des Sources 
ou de la Gloire de mon père. Pagnol, je le lis et le regarde (et avec 
plaisir, souvent) comme un film de Jacques Tati, comme une photo jaunie 
d'avant-guerre, un Marseille de vieille carte postale qui n'a plus rien 
à voir avec la réalité d'aujourd'hui, qui n'a pas grand-chose d'autre à 
m'apporter que le rêve nostalgique d'une France que je n'ai pas connue. 
Giono est bien loin de cette Provence de boutique de souvenirs, de ce 
décor parfumé à la bouillabaisse, de la galéjade, de "l'accent qui se 
promène et qui n'en finit pas", de Marius et Olive, Lou Pescadou et 
Trois de la Canebière, tu-me-fends-le-cœur, oh ! bonne mère ! bien loin 
aussi du moulin de Daudet et de la lamentable cigale stridente de Jean 
Aicard, qui vibre plus que jamais dans les pins toujours verts. 
D'ailleurs, il se voyait plutôt comme un homme du nord, des brumes, 
n'aimant pas le soleil et avouant qu'il aurait aimé vivre en Écosse. 
Giono détestait Mistral et le Félibrige, et le Angèle de Pagnol lui 
était apparu comme une trahison (ce qu'il était, en toute objectivité). 
C'est que Pagnol n'a pas pu - ou n'a pas voulu - sortir du régionalisme 
- ce n'est pas une condamnation, le genre a ses lettres de noblesse -, 
alors que Giono s'est élevé au rang d'écrivain universel. En musique, 
la Provence de Giono est proche de celle de Milhaud, âpre, crue, 
rapeuse et dissonante. En peinture, c'est plutôt Van Gogh, ses cyprès 
torturés et ses nuits impudiques. En littérature, je le rapprocherais 
volontiers de Ramuz, un autre auteur - bien mal connu - qui s'est 
libéré de ce piège sournois qui guette les gens qui sont nés quelque 
part et vous font voir "du pays natal jusqu'à loucher".
--
Paul & Mick Victor
Roi sans divertissement