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From: Paul & Mick Victor <b.suisseVotreculotte@gmail.com>
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Date: Tue, 10 Oct 2023 03:07:24 +0700
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X-Newsreader: MesNews/1.08.06.00
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Lines: 35

[I. comme Interprétation] :

Lorsque l’on joue un concerto, il est naturel d’opposer la lecture 
orchestrale collective à la subjectivité du ou des artistes solistes. 
Évidemment, certains éléments d’appréciation d’une interprétation sont 
objectifs. Par exemple, le tempo. Mais que se cache-t-il derrière un 
tempo lent ? Je pense par exemple à Alexandre Toradze dans le Concerto 
no 2 de Prokofiev. Il y exprime une grande subjectivité, comme s’il 
plaquait un scénario sur les notes, une histoire fantastique, connue de 
lui seul, et rendant son interprétation passionnante pour le public. Je 
suis réservé envers les artistes trop “objectifs”. J’ai entendu dans ma 
vie de nombreuses interprétations parfaites mais vides ; j’ai vu des 
techniciens extraordinaires, sans aucune profondeur. C’est le drame de 
notre temps. Pour les solistes et aussi pour la musique orchestrale. 
Aujourd’hui, les grandes phalanges sont capables de tout jouer après 
quelques heures de répétitions. Même les œuvres jugées les plus 
difficiles dans le passé, comme Le Sacre du printemps, sont exécutées 
sans problème. Dans ce sens il y a un progrès. Mais quid de 
l’interprétation ? Comment rendre éloquentes ces milliers de notes de 
la partition du Sacre ? Il est facile de rester à la surface. Entrer 
dans une partition, tenter d’en percer les mystères, c’est autre chose. 
Le Sacre du printemps n’est pas seulement une œuvre spectaculaire.
Il est fondamental de chercher la vérité de la partition. Une vérité 
qui n’est pas extérieure au texte, mais qui se trouve dans les notes. 
Si Toradze ou Trifonov interprètent une musique avec originalité, avec 
subjectivité, ils établissent toujours un dialogue fructueux avec le 
compositeur. C’est pourquoi j’ai aimé et soutenu Lucas Debargue pendant 
le Concours Tchaïkovski 2015. Son Gaspard de la nuit était très 
“artiste”. Cela changeait des performances uniquement sportives que 
l’on peut souvent entendre dans ce genre de compétition.

Valery Gergiev : Rencontre. Entretiens avec Bertrand Dermoncourt. Actes 
Sud, 2018.
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Paul & Mick Victor
Ohé ! Y'a quelqu'un ?